Abstract
|
:
|
L'objet de cet article est de montrer que l'“Esotérisme occidental”, entendu comme champ de recherche spécifique, est le résultat d'un discours polémique qui s'est développé dans la culture occidentale au cours de nombreux siècles. La culture occidentale définit sa propre identité par le moyen d'un Grand Récit Polémique qui exclut certains types de religion, de vision du monde, ou de pratique, lesquels ressortiraient au domaine de “l'Autre”. C'est ainsi que le monothéisme définit son identité en rejetant le “paganisme” et l'“idolâtrie”; les premiers théologiens chrétiens, en rejetant l'hérésie du “gnosticisme”; le christianisme ancien et médiéval en rejetant la magie comme inspirée par des démons; le Protestantisme, en rejetant le Catholicisme Romain comme idolâtrie crypto-païenne; et les Lumières, en rejetant toute une série de croyances et de pratiques comme liées à l'hermétisme et à “l'occulte”. Par suite de ce processus cumulatif, l'“espace” occupé dans l'imaginaire collectif par l'“Autre” païen s'est peu à peu empli de contenus toujours nouveaux au fur et à mesure que le temps passait, et a continué à se développer, à s'étendre, jusqu'à finir, dans la recherche et le discours académiques dominants, par devenir une sorte de corbeille à papier de “savoir rejeté”. Récemment, des chercheurs ont commencé à se rendre compte que ce terrain, maintenant désigné généralement sous l'appellation de “Esotérisme occidental”, nécessite une étude sérieuse et impartiale. D'un point de vue historique, la Grand Récit Polémique, qui est à la base de notre identité culturelle commune, consiste en une longue série de simplifications successives fondées sur des programmes idéologiques et normatifs. Or, une tâche importante dévolue à la recherche historique et critique consiste à apporter un correctif aux faits historiques ainsi dénaturés, et à développer une compréhension plus complexe, plus nuancée, et plus neutre, de la culture occidentale. Voir les choses selon cette perspective nouvelle ne saurait perpétuer le programme polémique de base qui voit dans les idées et les développements de l'“ésotérique” quelque chose qui ferait partie d'une contre-culture des “autres”, dirigée contre le discours dominant. Il s'agit, en revanche, de les analyser en tant que dimension négligée de la culture et de la société en général. Une telle approche n'est pas seulement susceptible de nous aider à mieux saisir le sens de la réalité historique; elle est également, et nécessairement, appelée à connaître des implications radicales quant à la manière dont “nous” percevons notre propre identité. L'objet de cet article est de montrer que l'“Esotérisme occidental”, entendu comme champ de recherche spécifique, est le résultat d'un discours polémique qui s'est développé dans la culture occidentale au cours de nombreux siècles. La culture occidentale définit sa propre identité par le moyen d'un Grand Récit Polémique qui exclut certains types de religion, de vision du monde, ou de pratique, lesquels ressortiraient au domaine de “l'Autre”. C'est ainsi que le monothéisme définit son identité en rejetant le “paganisme” et l'“idolâtrie”; les premiers théologiens chrétiens, en rejetant l'hérésie du “gnosticisme”; le christianisme ancien et médiéval en rejetant la magie comme inspirée par des démons; le Protestantisme, en rejetant le Catholicisme Romain comme idolâtrie crypto-païenne; et les Lumières, en rejetant toute une série de croyances et de pratiques comme liées à l'hermétisme et à “l'occulte”. Par suite de ce processus cumulatif, l'“espace” occupé dans l'imaginaire collectif par l'“Autre” païen s'est peu à peu empli de contenus toujours nouveaux au fur et à mesure que le temps passait, et a continué à se développer, à s'étendre, jusqu'à finir, dans la recherche et le discours académiques dominants, par devenir une sorte de corbeille à papier de “savoir rejeté”. Récemment, des chercheurs ont commencé à se rendre compte que ce terrain, maintenant désigné généralement sous l'appellation de “Esotérisme occidental”, nécessite une étude sérieuse et impartiale. D'un point de vue historique, la Grand Récit Polémique, qui est à la base de notre identité culturelle commune, consiste en une longue série de simplifications successives fondées sur des programmes idéologiques et normatifs. Or, une tâche importante dévolue à la recherche historique et critique consiste à apporter un correctif aux faits historiques ainsi dénaturés, et à développer une compréhension plus complexe, plus nuancée, et plus neutre, de la culture occidentale. Voir les choses selon cette perspective nouvelle ne saurait perpétuer le programme polémique de base qui voit dans les idées et les développements de l'“ésotérique” quelque chose qui ferait partie d'une contre-culture des “autres”, dirigée contre le discours dominant. Il s'agit, en revanche, de les analyser en tant que dimension négligée de la culture et de la société en général. Une telle approche n'est pas seulement susceptible de nous aider à mieux saisir le sens de la réalité historique; elle est également, et nécessairement, appelée à connaître des implications radicales quant à la manière dont “nous” percevons notre propre identité.
|